Orange a consacré, le 28 novembre dernier, son forum annuel sur les grands sujets de société, le « Digital Society Forum », au défi du changement climatique en posant cette question : « le secteur du numérique est-il responsable du changement climatique ou une solution pour y faire face ? ».
Pour poser le cadre du débat, le climatologue Hervé le Treut, membre du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat mis en place par l’Organisation Mondiale de la Météorologie et l’ONU. En rappelant que 80 % de notre énergie est fossile dans le monde et qu’il faut atteindre 0 % dans trente ans, il a souligné le changement fondamental que cela impliquait, dans tous les domaines. Les secteurs clés sur lesquels il faut agir en priorité sont les transports, l’habitat, l’agriculture, l’industrie, et l’énergie. Le secteur du numérique ne représente que 3,5% des émissions de gaz à effet de serre. Si c’est l’une des causes du réchauffement, c’est aussi une opportunité et peut être une solution au problème.
Dirigeant du GeSI, qui regroupe au niveau internationale l’industrie digitale, Luis Neves précise que l’empreinte numérique du secteur est stable depuis plusieurs années, voire même orientées à la baisse. Un discours qui a du mal à passer dans une assemblée convaincue de l’impact croissant des usages numériques pour l’environnement.
Les acteurs du secteur font pourtant de vrais efforts, souligne Stéphane RICHARD, le patron d’Orange. Si son entreprise a émis 20,4 millions de CO2 en 2018, elle réduit ses émissions de 3% par an et les nouvelles technologies visent à réduire de plus en plus leur empreinte énergétique.
La fibre optique, par exemple, consomme trois fois moins d’énergie que le cuivre de l’ADSL
Stéphane RICHARD, PDG d’Orange
De son coté, le patron de Microsoft France, Carlo Purassanta, a rappelé que son entreprise s’était fixé pour objectif d’alimenter 75 % de ses data centers avec des energies renouvelables en 2023 et que ses produits sont recyclables à 95%. De même, le futur campus mondial de Microsoft, à Redmond près de Seattle, sera 0 émission et 0 déchet. Carlo Purassanta pense que le développement de l’Intelligence Artificielle permettra d’aider à agir encore plus efficacement et à rendre les villes plus efficaces.
Ces mesures ne semblent pourtant pas convaincre tout le monde. Auteur du livre « Pour une écologie numérique », Éric Vidalenc estime qu’il « ne s’agit plus d’optimiser le système mais de le transformer radicalement si on veut vraiment agir ».
Angel Prieto, diplômé de l’Ecole Polytechnique et membre du collectif pour un réveil écologique, a rappelé l’engagement de travailler pour des entreprises qui meneraient des actions concrètes en faveur de l’environnement, signé par plus de 32 000 élèves dans 400 établissements en Europe. « Il y a pour nous un vrai enjeu de mesurer l’impact du numérique et à avoir pour notre carrière un choix éclairé », a expliqué Angel Prieto.
Car chacun est, à son niveau, doit se considérer responsable. Or, moins d’un français sur trois se sent bien informé sur ces questions. Chaque foyer a, en moyenne, trois appareils numériques non utilisés au fond de ses tiroirs, alors qu’ils pourraient être recyclés. Mathilde Imer, co-présidente de Démocratie Ouverte et membre du Comité de gouvernance de la Convention citoyenne pour le climat, questionne : « est-ce que ce n’est pas aux citoyens de mettre le curseur ? » . Concrètement, elle constate qu’ « en France il y a peu de climatosceptiques, mais on est un peu dans le déni face à l’ampleur du défi. Alors nous réunissons, pendant six week-ends, 150 citoyens représentatifs de la société française pour délibérer et produire des politiques climatiques. Parmi de premières pistes de solutions qui émergent de ces groupes : le télétravail, qui évite un certain nombre de déplacements (numéro 1 dans la production de gaz à effet de serre). Citons aussi «réguler la publicité sur les produits les plus polluants ; avoir une taxe kilométrique sur les produits en fonction de la distance qu’ils ont parcourue ».
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