L’intelligence artificielle (IA) suscite de nombreuses questions et réflexions. Pour explorer ce sujet fascinant, connectez-vous sur le site d’Arte où une série de documents intitulée « Intelligences artificielles, Objets de curiosité » vous attend.
Objet de curiosité, certes. Les débats autour de l’IA ont captivé l’audience lors du Festival #VivaIssy. Parmi les intervenants, le philosophe Eric SADIN a dénoncé notre «aveuglement» face au «tournant intellectuel et créatif de l’IA», représenté par le lancement de ChatGPT. Il craint une crise culturelle, soulignant que ces systèmes empiètent sur nos facultés les plus fondamentales.
Un avis partagé par Pierre GIORGINI, Directeur d’études et de recherche à Mines Télécom et ancien Président-Recteur de l’Université Catholique de Lille. Lui aussi s’indigne contre la fascination aveugle qui nous empêche de voir les « angles morts » de l’Intelligence Artificielle. Il met en garde contre le bluff technologique et, comme Eric Sadin, estime que la théorie de «destruction créatrice» de Schumpeter, qui affirme que chaque innovation majeure crée plus d’emplois qu’elle n’en détruit, ne fonctionne plus.
En revanche, Luc JULIA, cofondateur de Siri et expert en IA, critique cette « vision hollywoodienne ». Selon lui, l’IA réelle est multiple et complexe, très différente des IA de science-fiction. « Il est essentiel de comprendre que l’IA n’a rien à voir avec le fonctionnement de notre cerveau. Par exemple, ChatGPT-4 est alimenté par 1200 milliards de données, mais cela ne signifie pas qu’il pense ou crée de manière autonome. » Pour lui, l’IA représente une révolution d’usage plutôt qu’une révolution scientifique, générant du contenu basé sur des données existantes sans véritable créativité.
Il a néanmoins insisté sur la nécessité de rester vigilant. En 2023, une université de Hong Kong a révélé que 63% des informations fournies par ChatGPT-3.5 étaient valides, soulignant l’importance d’une évaluation critique continue. Le concept de jailbreaking, où des humains parviennent à obtenir des réponses interdites, démontre la supériorité de l’ingéniosité humaine dans certaines situations. Il conclut en soulignant l’importance de l’éducation : expliquer, relire, vérifier et peser le pour et le contre de chaque utilisation de l’IA est indispensable.
Au NIDA, Ryan JEBALI, cofondateur de la ChatGPT Academy, a évoqué la célèbre question d’Alan Turing : « Les machines peuvent-elles penser ? ». La réponse, selon lui, est non.
Cette vigilance a été un thème récurrent pendant le Festival #VivaIssy. Au Press Club, par exemple, on a rappelé que le lancement de ChatGPT en novembre 2022 a marqué une rupture, rendant l’IA accessible et simple d’utilisation, comme le web l’avait fait pour Internet. Pour Camille SALINESI, professeur en informatique à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et co-responsable de l’Observatoire de l’IA, « les informaticiens ne sont pas à l’aise avec l’Intelligence Artificielle ». Habitués à des logiciels fiables, ils s’inquiètent des aléas de l’IA, notamment dans des applications comme les voitures autonomes.
La protection des données sensibles est également cruciale. Chez Canal+, par exemple, l’utilisation d’outils d’IA grand public est interdite pour éviter des fuites de données professionnelles. Le souvenir des employés de Samsung, qui au printemps 2023 ont involontairement causé une fuite de données via ChatGPT, reste vif.
L’IA Open Source a aussi été abordée pendant #VivaIssy. LINAGORA, par la voix de ses dirigeants Alexandre ZAPOLSKY et Michel-Marie MAUDET, défend cette approche. Ils estiment que face aux géants américains et chinois imposant leurs technologies propriétaires, une alternative 100% Open Source peut défendre la diversité des langues, cultures et valeurs européennes. Demander à ChatGPT qui a inventé l’aviation illustre bien les enjeux de la souveraineté technologique.
Dix-huit mois après le lancement de ChatGPT, les questions restent d’actualité : Quel est le futur de l’intelligence artificielle ? Va-t-elle nous remplacer ou devenir un super assistant ? Les débats continuent et les perspectives évoluent, mais une chose est sûre : l’IA n’a pas fini de susciter notre curiosité.