Le 7 novembre dernier, quatre acteurs majeurs de l’innovation coréenne et de ses partenariats avec la France se sont réunis au Nida, à Issy-les-Moulineaux, pour analyser en profondeur le modèle coréen et ses pistes de transposition. Ce petit-déjeuner débat, coordonné avec la Fondation France-Asie dans le cadre du Lab de #VivaIssy, a mis l’accent sur le pragmatisme du terrain : comment passer de l’inspiration à l’exécution, sans perdre temps ni moyens.
La Corée du Sud s’impose comme test-bed à grande échelle pour l’innovation, où l’État, les grands groupes et les start-up avancent en synergie. Ce modèle national teste, corrige et déploie à un rythme soutenu, alimentant une économie numérique qui fait office de vitrine internationale – qu’il s’agisse de l’intelligence artificielle, des infrastructures 5G ou de la santé connectée. Le prototypage rapide et le passage à l’échelle sont des étapes systématiques, grâce à une culture du “pali-pali” (« vite, vite » en coréen) et à une méthode des boucles courtes valorisant l’action face à la planification excessive.
Jean-Marie Hurtiger, ambassadeur pour les investissements en Corée au sein de KOTRA, a détaillé comment les politiques d’attractivité et de souveraineté structurent l’écosystème. La Corée, avec 75% du marché mondial des mémoires DRAM par Samsung et des plans stratégiques à 10 ou 20 ans, garantit aux investisseurs des guides pratiques où tout est transparent. L’Ombudsman, institution inspirée de la Suède, accélère la résolution des blocages pour les entreprises étrangères, pouvant lancer une usine en deux mois.
Pascal Robin, ancien Directeur Général de Sanofi Corée, a illustré la puissance du marché coréen dans la santé par un exemple concret : le vaccin hexavalent, adopté après quatre ans de négociations pour respecter les équilibres du système médical. Il a mis en avant trois leviers : vision sectorielle claire, investissements massifs (plus de 5% du PIB en R&D), et une agilité réglementaire inédite, avec la politique du bac à sable (sandbox policy) permettant de tester en conditions réelles des innovations comme les drones de livraison ou de nouvelles molécules.
Clément Metharam, expert technique international en Innovation et Technologies de pointe auprès du KISED – Korea Institute of Startup & Entrepreneurship Development, a exposé la structuration des start-ups coréennes : un ministère dédié depuis 2017, des incubateurs universitaires et la culture du partenariat public-privé. Les consortiums réunissent grands groupes et PME pour assurer une maîtrise de chaque brique technologique, avec des échéances courtes et des logiques de responsabilisation forte (remboursement des subventions en cas d’échec).
Charlie Suhan YOUN, fondateur de la start-up coréenne eFlow, a annoncé le lancement d’une expérimentation sur l’hydrogène domestique à Issy-les-Moulineaux, dans le cadre des Quartiers Métropolitains d’Innovation. L’innovation, sécurisée, donnera accès à la micro-mobilité avec une minute de charge pour 150 km d’autonomie. Cette solution, déjà testée en Corée où l’hydrogène commence à remplacer le gaz domestique, incarne la philosophie du “test and learn”, pilotée localement.
Les intervenants ont mis en contraste la dynamique coréenne et les attentes françaises. La France dispose d’ingénieurs et de champions technologiques, mais souffre d’image et d’organisation sectorielle éparpillée. Pour combler ce fossé, il est nécessaire de :
- définir 3 à 5 domaines stratégiques et une vision à 10 ans ;
- organiser des missions économiques collectives pour promouvoir une “marque France” technologique ;
- adopter une culture de l’expérimentation rapide et du consortium ;
- former les managers à l’interculturalité coréenne ;
- utiliser chaque territoire comme laboratoire, en communiquant massivement sur les succès locaux et les leçons apprises.
Le débat du Nida a souligné la dimension humaine : en Corée, le management est fondé sur l’engagement total, la cohésion de groupe et l’autonomie, là où la France valorise le débat et l’individualité.
La Corée du Sud offre ainsi un modèle concret, fondé sur la vitesse, l’organisation et la coordination, dont la France peut s’inspirer à travers des programmes pilotes, une vision stratégique et un état d’esprit “test and learn” adapté au local.
Si vous avez une expérience professionnelle en Corée du sud ou souhaitez explorer les possibilités de coopérer avec une entreprise coréenne, partagez votre avis dans les commentaires.
